Lundi dernier, Constant Mutamba, ministre d’État de la Justice et garde des sceaux de la République Démocratique du Congo, a pris la parole pour commenter les discussions en cours sur une possible révision de la Constitution. Cette question fait depuis plusieurs mois l’objet de vifs débats entre le pouvoir en place, l’opposition politique et les organisations de la société civile. Pour Mutamba, la révision des lois, et en particulier de la Constitution, relève non pas d’un changement fondamental, mais de l’adaptation des textes législatifs aux réalités sociales et politiques du pays.
Dans son discours, Mutamba a souligné que « les réformes » sont indispensables à la bonne gestion d’un pays. Selon lui, un gouvernement ne peut « gouverner sans réforme », car les questions sociales doivent être résolues par des ajustements législatifs. « Ce sont les hommes qui élaborent les lois pour résoudre des problèmes précis. Et quand ces lois montrent des failles dans leur application, il est nécessaire de les adapter », a-t-il déclaré. Le ministre a également cité le penseur français Jacques Louis de Rouvillois, qui affirmait que « les constitutions ne sont pas des tentes dressées pour le sommeil, elles doivent s’adapter aux réalités sociétales ».
Pour le ministre, l’adaptation des lois, loin d’être une menace, doit être perçue comme une nécessité pour faire face aux défis actuels. Cette position rejoint celle du président Félix Tshisekedi, qui a souvent exprimé sa volonté de réformer la Constitution pour mieux répondre aux besoins du pays.
La révision de la Constitution : un sujet de division
Cependant, cette proposition de révision ne fait pas l’unanimité. L’opposition, notamment la plateforme politique Lamuka, qui regroupe des figures comme Martin Fayulu, voit dans cette initiative un moyen pour le président Tshisekedi de prolonger son mandat au-delà des limites actuelles. Lamuka a d’ores et déjà lancé une contre-campagne intitulée « changeons Félix Tshisekedi et pas la Constitution ». Cette campagne vise à sensibiliser l’opinion publique contre toute tentative de modifier la Constitution afin de permettre au président de se maintenir au pouvoir.
L’opposition met en garde contre ce qu’elle considère comme une dérive autoritaire. Selon certains de ses leaders, une révision de la Constitution pourrait ouvrir la voie à des mandats illimités, fragilisant ainsi les fondements démocratiques du pays. Ils insistent sur le fait qu’une telle révision serait un contournement de l’esprit des accords politiques de 2006, qui avaient permis l’instauration d’un cadre constitutionnel garantissant des mandats limités et une alternance démocratique.
Le camp présidentiel plaide pour une révision « nécessaire »
De l’autre côté, le Parti Union pour la Démocratie et le Progrès Social (UDPS), le parti présidentiel, milite en faveur d’une réforme constitutionnelle. Augustin Kabuya, secrétaire général de l’UDPS, a affirmé que la Constitution actuelle empêche le président de mener à bien son mandat. Selon lui, les délais nécessaires à la formation du gouvernement, à l’investiture du président et à la mise en place de certaines institutions sont trop longs, ce qui entrave le bon exercice du pouvoir. Le parti présidentiel soutient donc que la révision constitutionnelle est non seulement souhaitable, mais urgente pour permettre une gestion plus efficace du pays.
Dans certaines régions du pays, des membres de l’UDPS ont déjà commencé à mener une campagne pour encourager les citoyens à soutenir la révision constitutionnelle, insistant sur le fait que la réforme permettrait d’améliorer l’efficacité du gouvernement et d’adapter les institutions aux exigences contemporaines du pays.
L’équilibre fragile entre réformes et stabilité
La question de la révision de la Constitution en République Démocratique du Congo ne semble pas prête de trouver une réponse consensuelle. D’un côté, les partisans du gouvernement soulignent la nécessité de réformes pour s’adapter aux réalités politiques et économiques du pays. De l’autre, l’opposition craint qu’une telle révision ne serve qu’à légitimer un pouvoir autoritaire et prolonger indéfiniment le mandat du président Tshisekedi.
Dans ce contexte, il est probable que les discussions sur la révision de la Constitution se poursuivent dans les prochains mois, avec des enjeux cruciaux pour l’avenir politique du pays. Les autorités congolaises devront jongler entre la nécessité d’adapter les lois aux défis du moment et l’impératif de maintenir la stabilité démocratique, essentielle pour éviter une dérive autoritaire et préserver les acquis politiques du pays.
L’opposition, quant à elle, promet de ne pas laisser cette question de côté et continue de mobiliser les citoyens pour faire entendre sa voix contre toute modification constitutionnelle qui pourrait fragiliser le processus démocratique.